Un dernier présent - Première partie
Encore un début de nouvelle pas terminé, mais bon, dites-moi si ça vaut la peine que je continue ;)
Un dernier présent
Il
se trouvait là, sur le paillasson « Welcome » de l’entrée de son
appartement. Pas plus gros qu’une boîte de conserve, il était abondamment
harnaché de ficelle et de bande adhésive, le tout enveloppé dans du papier
beige. Un jeune homme, tout las qu’il était, hésita d’abord à l’observer ce
soir. Il était tard et les évènements de la journée l’avait vidé de son
énergie. Pourtant, lorsque ce dernier vit, en haut à gauche du colis, barrée au
feutre noir, l’adresse du l’expéditeur, son cœur bondit :
Mont Arcal
Droit chemin
ILE PERDUE
Après avoir réfléchi à
deux fois avant de se décider à l’ouvrir, la curiosité l’emporta sur la
prudence, et il déchira presque violemment le papier. L’adresse de l’expéditeur
l’avait rendu ivre de curiosité et il bouillait intérieurement de découvrir la
nature du colis. C’était la même chose à chaque fois, il ne pouvait se
maîtriser dès qu’on lui parlait de mystère et de cartes au trésor perdues, il
perdait toute sagesse, il était comme un enfant, qui croit encore au Père Noël,
la veille du 25 Décembre.
Il ne savait pas s’il devait regretter ou non son geste,
le contenu qui s’était offert à ses yeux après la violente ouverture l’avait
énormément bouleversé, au point qu’il ne souhaitait à personne pareil
sentiment. Depuis, l’envie le torturait d’approfondir l’étude minutieuse du
contenu, mais sa sagesse lui criait de ne pas être naïf à ce point, de jeter
tout ça à la poubelle pour ne pas paraître ridicule lorsque les brigands qui lui
ont joué ce mauvais tour sortiront de leur cachette en riant à pleines dents.
Pourtant, il ne pouvait lutter indéfiniment contre l’envie qui lui tordait les
boyaux. Il décida, à défaut d’obéir à sa conscience, de relire le bout de
papier :
Joe Ornwel, fils du fier Loren Ornwell, je vous
convie, vous et votre rêve d’enfant
A me rejoindre sur l’ILE PERDUE dans la semaine qui
suit cette semaine-ci
Au-delà de cette date, la porte de mon île vous sera
à jamais close
Et vous n’aurez plus jamais l’occasion de découvrir
mon trésor
Je ne vous donnerai qu’un seul conseil pour votre
décision
Ecoutez, au fond de vous, ce que vous dit votre cœur,
Il ne vous
trompera pas, jamais il ne vous mentira
Vous trouverez le moyen d’accès sur le chemin
A très bientôt donc … et bonne chance
Qui lui avait écrit, il
n’avait aucun moyen de le savoir, tout ce qu’il était capable de faire, était
de tourner et retourner dans son esprit les mots, rêve, Ile perdue, trésor,
chemin … Eux mêmes qui étaient responsables de son grand désarroi.
Sa décision fut prise
assez vite, finalement, bien plus que ce à quoi il s’attendait. Bien qu’il ne
doutait pas un seul instant du chemin qu’elle prendrait, il savait que le choix
aurait pu durer des heures, surtout pour des questions d’équilibre mental personnel
( se croire fou n’est en effet jamais une bonne chose) . En effet, il y avait
de quoi douter. On se trouvait au début du XXIème siècle, dans la grande ville
américaine de Los Angeles, et un paquet inconnu lui indiquait l’existence d’une
« Ile perdu »… il y avait de quoi rire, mais pas de quoi se laisser
convaincre. Pourtant, Joe n’en fit rien, et mit la clé sous la porte à 11
Heures du soir, à peine 2 heures après être rentré de la cérémonie funéraire.
Bien que ne sachant pas vers où se diriger, il décida, une bonne fois pour
toute, de faire entièrement confiance à son instinct. Il avait vu beaucoup de
grands explorateurs et de héros d’une autre époque remettre leur jugement entre
les mains de leur instinct, et cela marchait, alors pourquoi ne pas essayer.
Il descendit d’abord le
Story Boulevard, puis pris en direction du port. Une île devait obligatoirement
se trouver sur l’eau, du moins c’est ce qu’il pensait. En marchant, il prit
dans sa poche l’objet qui avait été mis dans le colis. Bien qu’il n’avait pas
trouvé de signification à sa présence à première vue, il ne doutait pas qu’il
lui servirait le moment venu. Un étrange objet de terre cuite, de forme ovale,
avec un bulbe de diamant vert au centre, étincelant comme une étoile dans une
cage de verre. Son imagination s’était tout de suite enflammée mais il l’avait
aussitôt calmée, même si la folie du magique lui faisait bouillir les
entrailles. Il se sentait fou, à l’intérieur, c’était une idée tellement
absurde. Tout en réfléchissant, il avait parcouru tout le boulevard, avait
franchi carrefour, longé les embarcadères, et était enfin arrivé au port. Les
quelques bateaux amarrés formant d’immenses ombres noirs, et les bâtiments
faiblement éclairés par des lampadaires dont le fonctionnement devenait douteux
au rythme de leur clignotements anormaux, donnaient à la scène une ambiance
étrange, et pour le moins mystérieuse. Joe devint légèrement inquiet, et marcha
dans l’ombre des hangars pour ne pas attirer l’attention des quelques clochards
qui traînaient là. Il ne savait si ce comportement était inconsciemment copié
sur celui des acteurs de films à suspence, ou bien s’il avait réellement
ressenti le besoin de marcher dans l’ombre. Seulement, à force de trop observer
ce qui se passait autour de lui, il en oublia de regarder où il mettait les
pieds et trébucha violemment sur un des mendiants. Ce dernier poussa à peine un
râle dans son sommeil et, Joe, pris de panique, s’enfuit sans un bruit, tout
recroquevillé sur lui-même. Il courut peu de temps mais suffisamment pour
s’assurer que personne ne l’avait remarqué, et que le vieillard ne lui en
voulait pas trop. Ce dont il ne s’était pas douté, c’est que le mendiant qu’il
venait de rencontrer était un des plus habiles pickpockets de toute la ville. A la place
de retrouver son portefeuille dans sa poche, à l’endroit où il aurait dû normalement
se trouver, il pût constater que le voleur ne lui avait laissé que sa carte de
visite. Le ventre de Joe fut cette fois secoué d’un violent séisme quand il
remarqua qu’au dos de la carte était inscrit une adresse.
Mernak Cafard,
12 Av Long street
Votre serviteur à toute heure
Cela avait clairement été
griffonné au crayon de papier. Dix minutes plus tard, Joe se trouvait devant
une petite bâtisse, haute d’un étage et éclairée de l’intérieur. Sur la porte
on pouvait lire : « Mernak Cafard, Votre serviteur à toute
heure ». Prenant son courage à deux mains, il cogna trois fois
contre la porte en bois et au troisième coup, la porte s’ouvrit sur un petit
homme, replet, grassouillet, avec pour seule coiffure une touffe de cheveux sur
l’arrière du crâne. Continuant son geste, Joe faillit de justesse donner un
coup aux bonhomme rondouillard mais ses réflexes évitèrent cette désagréable
situation. L’homme rondouillard souriait, semblant ne pas s’être aperçu de
l’upercut qu’il venait d’éviter. Il portait une tunique rouge à la mode des
valets d’autrefois, et ses petites lunettes lui donnaient un air de savant fou
débauché.
« - Entrez, entrez jeune gens.
L’auberge est ouverte, la chère y est bonne, et la chambre à prix menu. Je vous
fais préparer un lit sur le champ.
- Euh non attendez, je
crois qu’il y a confusion, je ne cherche pas du tout …
Ignorant sa question et
continuant sur le même ton de philosophe naïf, Mernak entraînait en même temps
notre Joe vers l’escalier qu’on devinait au bout de la pièce.
- Vous apprendrez jeune
homme que tout le monde cherche quelque chose, un but dans la vie est
indispensable à la réussite. Voyez-vous, j’ai toujours eu la vocation pour
devenir maître d’hôtel. Je ne pense pas avoir fait défaut à ma destinée en me
retrouvant maître d’auberge. Je suis assez satisfait de…
- Mernaaaaak, arrête
d’embêter le petit ! »
Une femme courtaude arriva
sur le champs et traîna plus que conduisit un Joe tout désarçonné à l’étage, le
fit entrer dans une petite chambre, et claqua la porte violemment la porte
derrière lui sur un « bonne nuit » tout aussi sec. Joe se retrouva
donc, à minuit, dans une chambre … d’auberge, 12 Av. Long street. Il ne vit
qu’une chose à faire, avant même de penser et de se sentir ridicule au point de
faire des bêtises, de se dire qu’il était aussi fou si ce n’est plus que son
père, de se laisser embarquer dans cette histoire sans broncher. Il ferma son
esprit aux réprimandes de son for intérieur, et s’allongea sur le lit miteux
tombant instantanément dans un sommeil qui se voulait réconfortant.
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Au matin, il se réveilla, endoloris
et comateux, avec cette nette impression d'avoir dormi des mois. Il étira
lentement ses muscles douloureux, tentant d'ouvrir ses paupières qui semblaient
vouloir se refermer à chaque vaine tentative de complète ouverture. Il se leva avec peine et se
rinça le visage à l’eau du robinet de la chambre, glaciale. Il alla un peu
mieux après cela, et s’habilla de ses vêtements, bizarrement frais et repassés.
Il ne voulut pas commencer à se poser de questions sur cette étrangeté, et se
dit qu’il était normal que les habitants des lieux se baladent à leur guise
dans leur auberge, surtout si c’était pour repasser des vêtements. Il descendit
donc afin de retrouver le fameux Mernak pour quelques explication, lui
semblait-il, bien méritées. Quand il déboucha dans la pièce dans laquelle il
était arrivé la veille, il ne put réprimer un cri émanant d’une intense
surprise. Ecarquillant les yeux, le cœur battant, il resta stupéfait devant la
vision qui s’imposait à lui.